DIFFÉRENCES ENTRE UN ENROULEUR ET UN EMMAGASINEUR
Lors des salons nautiques, plusieurs plaisanciers sont venus nous demander des informations sur les différences entre un enrouleur et un emmagasineur.
Enrouleur ou emmagasineur : dans les 2 cas,un système pour rendre la navigation plus simple.
Les plaisanciers les plus anciens ou ceux qui naviguent sur des petites unités ou des unités traditionnelles le savent : l’enrouleur ou l’emmagasineur reste un accessoire optionnel. La méthode traditionnelle de mise en place d’une voile d’avant est de la fixer sur l’étai à l’aide de mousquetons et de hisser ensuite le tout. Inconvénient : La voile doit être rangée après chaque navigation et ne peut pas être arisée facilement (diminuer sa surface).
L’enrouleur ou l’emmagasineur permet avant tout d’éviter cette corvée par un astucieux système d’enroulement.
L’enrouleur est depuis déjà de nombreuses années installé en standard sur tous les voiliers à l’exception de certains voiliers de régate. L’emmagasineur, reste un accessoire proposé uniquement en option et est souvent proposé en pack avec une voile supplémentaire. Souvent un gennaker.
Nous allons rentrer dans les détails mais pour faire très simple, les 2 systèmes permettent d’enrouler des voiles. L’enrouleur gère l’enroulement de la voile principale qui reste tout le temps en place quand l’emmagasineur gère l’enroulement des voiles supplémentaires qui sont généralement rangées après leur utilisation. Voyons maintenant tout cela de manière plus précise.
Les différences :
1ère DIFFERENCE FONDAMENTALE : L’ENROULEUR INTEGRE L’ETAI STRUCTUREL
Le point le plus simple à comprendre est qu’un enrouleur intègre l’étai principal de votre voilier (le câble qui tient le mât vers l’avant du voilier). Si par mégarde, vous enlevez l’axe haut ou bas de votre enrouleur, votre mât ne tardera pas à tomber vers l’arrière !
L’emmagasineur quant à lui, n’a pas de vocation structurelle et vous pouvez donc l’enlever ou le remettre sans vous soucier de la tenue de votre mât. L’enrouleur étant perpétuellement en place, la voile d’avant principale y est donc également perpétuellement à poste. Il est possible de descendre cette voile pour une réparation ou un hivernage mais cela
demande toutefois un peu de temps et d’efforts. Le nom générique de cette voile est le génois. Si cela vous intéresse, un autre article traite des différents types de voiles d’avant.
2ème DIFFERENCE FONDAMENTALE : L’ENROULEUR EST COMPOSE DE PROFILS CREUX ET PERMET DE REDUIRE LA VOILE
Quelque soit la marque de votre enrouleur, vous retrouverez systématiquement les mêmes
éléments :
Une tourelle où est stocké le cordage qui permet d’actionner le système.
Des profils en aluminium creux dans lesquels passe l’étai principal avec un système (éclisse) pour relier ces profils les uns aux autres.
Un émerillon coulissant le long des profils pour hisser/affaler la voile.
1 fixation haute pour le mât et une fixation basse pour le pont (cardans)
L’emmagasineur, n’est composé que d’une tourelle et d’un émerillon mais sans profil en aluminium. La pièce de liaison est un cordage ou un câble anti torsion intégré dans le guindant de la voile et installé par votre maître voilier.
Sur un enrouleur, une rotation d’un tour de la tourelle (en bas) implique toujours un tour de l’émerillon (en haut). Quelques soient les conditions, les profils aluminium transmettront systématiquement un effort appliqué du bas vers le haut. C’est ce qui permet un enroulement uniforme de la voile.
Pour un emmagasineur, l’élément de transmission des efforts est le câble anti torsion. Aussi performant soit il, ce cordage ou ce câble textile ne sera jamais aussi efficace qu’un profil aluminium (inox, titane ou carbone). C’est la raison principale qui explique pourquoi il est possible de prendre un ris dans son génois avec un enrouleur et qu’il est impossible de le faire avec un emmagasineur. Une voile sur emmagasineur s’utilise donc uniquement totalement déployée.
Autre particularité de l’emmagasineur : le système d’enroulement est majoritairement une roue crantée équipée d’un cordage en boucle au lieu d’un tambour équipé d’une seule ligne de cordage.
Plusieurs raisons à cela :
1- L’emmagasineur doit rester un équipement léger et compact pour profiter d’une surface de voile maximale et être facile à installer (le poids et l’encombrement sont 2
critères de choix).
2- Il arrive parfois sur un enrouleur qu’il vous manque quelques tours de cordage pour finir d’enrouler votre voile ce qui vous oblige à intervenir rapidement sur la plage avant. Ce phénomène reviendra encore plus fréquemment quand un tambour est utilisé sur un emmagasineur.
Certains plans de pont exigent cette configuration. Ce n’est pas un problème majeur mais cela demande un peu de surveillance et d’anticipation.
Cas particuliers : le tuff luff et l’emmagasineur structurel (ou stockeur)
Certains voiliers de course ou certains voiliers performants sont à la recherche de systèmes les plus légers possibles pour éviter des poids inutiles dans les parties hautes du mât.
Le Tuff Luff est un profil en plastique d’une seule pièce sur lequel est installé une voile munie d’une ralingue. L’étai passe dans une desgoulottes. Attention ! Ce système ne permet pas d’enrouler une voile.
L’emmagasineur structurel (ou stockeur) est un emmagasineur amélioré et sécurisé qui intègre l’étai mais qui n’utilise pas de profils aluminium. Ce système permet d’avoir un ensemble extrêmement léger et permet d’enrouler la voile. Inconvénient : il n’est toujours pas possible d’utiliser partiellement celle ci.
Un emmagasineur pour une voile supplémentaire
Tous les voiliers de série neufs sont livrés habituellement avec une Grand Voile (GV) et un génois sur enrouleur. Ces voiles sont destinées à être en place pendant de longues périodes et sont d’ailleurs protégéspar des tissus anti UV.
Puisque le génois sur enrouleur est par définition toujours en place, on peut utiliser un emmagasineur pour enrouler une voile complémentaire.
Une voile sur emmagasineur est habituellement rangée après chaque utilisation. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on parle parfois de voiles volantes. Dans la pratique,
la voile peut rester en place pendant plusieurs heures ou plusieurs jours.
une voile supplémentaire pour améliorer les performances de mon voilier… et mon confort
Dans l’absolu, on pourrait faire un tour du monde avec un simple génois sur enrouleur mais dans de nombreux cas, celui-ci ne pourra pas être parfaitement adapté.
Pas assez de vent au près ! Une voile plate plus grande et plus légère éviterait de démarrer le moteur. La solution = Code 0, Code 1, Code 2, …
Pas assez de vent au portant (vent arrière) ! Une voile plus grande et beaucoup plus arrondie qu’un génois permettrait d’aller plus vite et d’éviter un roulis particulièrement désagréable. Solution = Gennaker, Spi asymétrique, Spi Symétrique, …
Trop de vent ! Il faut alors réduire en enroulant le génois mais le génois travaillera mal, faseyera et se détériorera rapidement. Une voile plus petite serait mieux adaptée. La solution = Trinquette, Code J, tourmentin, …
C’est pour répondre à ces problématiques que les plaisanciers comme les coureurs utilisent des voiles supplémentaires. Dans tous les cas, il s’agit soit d’une recherche de vitesse, soit d’un souhait de ne pas utiliser une voile partiellement roulée et dans tous les cas de toujours privilégier l’utilisation d’une voile plutôt qu’un moteur afin d’aller plus vite d’un point A à un point B.
Quelles sont les voiles fréquemment utilisées avec un emmagasineur ?
Pour les voiliers de course, toutes les voiles (ou presque) sont sur emmagasineur et il peut y en avoir beaucoup ! Pas besoin pour autant de posséder plusieurs emmagasineurs. Un seul peut être utilisé pour plusieurs voiles si celui-ci est suffisamment dimensionné pour être utilisé avec la voile la plus puissante (trinquette ou code 0 habituellement).
Pour un voilier de croisière, les voiles les plus fréquemment utilisées avec un emmagasineur sont (dans l’ordre) :
Le gennaker : C’est une voile particulièrement facile à utiliser (pas de tangon) entre le vent de travers et le portant. Il existe des gennakers plus ou moins arrondis en fonction des souhaits et des programmes de navigation. Discutez-en avec votre maître voilier.
Le spi : Le cauchemar de nombreux plaisanciers et c’est pourtant la voile la plus efficace quand le vent vient de l’arrière ! Le spi peut s’installer à la volée, avec une chaussette ou avec …un emmagasineur !
Différents systèmes existent mais le plus courant est l’emmagasineur de spi « Top Down » qui n’est adapté que pour les spis asymétriques. C’est sans nul doute le meilleur moyen de se réconcilier avec cette voile très efficace. Un emmagasineur de spi est différent d’un emmagasineur pour d’autres types de voile. Un emmagasineur de spi doit être équipé d’un système d’émerillon sur la partie basse de l’emmagasineur qui permettra d’enrouler le spi d’abord sur la partie haute. Cela a pour effet d’étouffer le spi sans effort quelques soient les conditions météos et l’allure de votre voilier
Le Code 0 : Il s’agit ni plus ni moins que d’un grand génois fabriqué avec un tissu léger. A utiliser au près, bon plein ou travers. Cette voile est soumise à des efforts importants et par conséquent les tissus utilisés sont souvent techniques (sandwichs, laminés, …)
La trinquette : La trinquette est la seule voile qui s’installe entre le génois et le mât. Toutes les autres voiles s’installent en avant et fonctionnent mieux avec un bout dehors, une delphinière ou un point d’accroche à l’extrémité de l’étrave. Habituellement utilisée sur un étai larguable (non utilisé 99 % du temps et qui tape contre le mât). Bonne nouvelle ! Cette voile peut tout à fait être utilisée avec un emmagasineur et des solutions existent pour remplacer l’étai larguable en inox par un câble textile anti torsion beaucoup plus léger et surtout amovible.